Actualité : La loi de relance de l’économie, aussi appelée loi Macron, est en train de terminer son parcours parlementaire. Elle fait l’objet d’un vote solennel au Sénat le 12 mai 2015 suite à une demande de procédure accélérée de la part du gouvernement. Dans l’optique de « libérer la croissance en France », un des points débattus est légitimement le partage du profit et plus précisément le dynamisme de l’épargne salariale, qui concerne aujourd’hui 11 millions de salariés.
Nous avions déjà expliqué les enjeux et les différentes facettes de l’épargne salariale (voir cet article) qui est un outil central aussi bien pour le fonctionnement interne de l’entreprise que pour le dynamisme économique.
La loi Macron, présentée au Conseil des Ministres le 11 décembre 2014, possède trois piliers : la libération des activités contraintes, la stimulation de l’investissement et de l’innovation et enfin le développement de l’emploi et du dialogue social. Dans cette optique, elle vise notamment à rendre l’épargne salariale plus attractive. Cependant, comme toutes les réformes qui l’ont précédée, elle n’entraine pas de révolution pour le système d’épargne salariale. Après son passage à l’Assemblée Nationale en février, la loi Macron a fait l’objet d’une Commission Spéciale, puis elle a été étudiée de début avril à début mai par le Sénat. Une commission paritaire mixte (sénateurs et députés) doit s’accorder sur un texte unique avant de promulguer la loi. Le cas échéant, si un accord n’est pas trouvé, elle repasse par l’Assemblée Nationale en seconde lecture. Cette dernière détient le fin mot, ce qui a laissé planer, pendant tout l’examen de la loi, une rumeur « d’appel d’air » en raison du jeu des majorités. En effet, le gouvernement possède la majorité à l’Assemblée Nationale mais l’a perdue au Sénat en 2015.
Nous avions déjà traité l’épargne salariale comme un outil de relance, au cœur des problématiques actuelles mais sujet à de multiples réformes législatives (voir cet article). Ainsi, au terme de cette épreuve constitutionnelle, quelles sont finalement les nouvelles modalités qui viennent d’être adoptées lors de la lecture en séance publique ?
Initialement, l’orientation principale concernant l’épargne salariale, suite aux recommandations du Copiesas, portait sur la simplification de ses mécanismes, son développement pour les PME, l’orientation de l’épargne vers les PME-ETI, la diminution du taux du forfait social, ainsi qu’une faveur fiscale envers le PERCO (Plan d’Epargne pour la Retraite Collectif). La Commission Spéciale a apporté en mars dernier quelques changements sur le texte initialement adopté par l’Assemblée Nationale. La Commission a tablé sur :
– une baisse du forfait social de 16 à 12% concernant le PERCO sur la participation, l’abondement et l’intéressement. Le PERCO étant la 2èmeenveloppe d’épargne salariale, la baisse du forfait social s’y appliquant est un signe de coup de boost pour l’épargne de long terme.
– La possibilité de verser 10 jours de congés sur le PERCO ainsi que l’instauration de la gestion pilotée du PERCO à partir du 1er janvier 2016 permettant de prendre moins de risque à l’approche du départ à la retraite.
– L’exonération du forfait social pour les entreprises de moins de 50 salariés, pendant trois ans sous condition que ce soit la première mise en place d’un accord d’intéressement ou de participation. Ensuite un forfait à 8% s’appliquera pendant 3 ans (alors qu’il est de 20% aujourd’hui).
– Le forfait social doit s’abaisser à 16%[1] pour les plans qui se dirigent vers le financement des PME-ETI.
– L’obligation d’établir des négociations intra branches avant la fin décembre 2017 pour les accords d’intéressement.
– La mise en place obligatoire de la participation dans les entreprises mais avec un délai de trois ans si un accord préexiste.
– La suppression de l’obligation du livret d’épargne salariale (livret E) proposé par le gouvernement dans une optique d’information à l’entrée dans l’entreprise.
– Enfin en guise d’harmonisation, intéressement et participation doivent désormais être versés le »premier jour du sixième mois suivant l’exercice de calcul au titre duquel les droits sont nés » (le 1er juin donc).
Le Sénat est revenu sur certaines décisions de la commission spéciale mais en a validé plusieurs le vendredi 17 avril parmi celles listées ci-dessus. On note par exemple la suppression des règles de représentativité du conseil de surveillance des fonds communs de placement des plans d’épargne salariale (Plan Epargne Entreprise (PEE) et PERCO). Alors qu’il était proposé que les salariés soient représentés à hauteur de 66%, cette dernière revient à son niveau initial, à savoir 50%. De plus, lors du versement de l’intéressement, sans choix exprimé sur l’utilisation de la prime de la part du salarié, son montant est placé et bloqué sur un PEE à partir de 2016.
Ainsi, le fléchage sous-jacent dans la loi Macron vers le renforcement d’une épargne salariale de long terme par rapport à l’épargne retraite est réaffirmé par le texte final. La recherche de croissance est bien le principal mot d’ordre, avec la volonté d’harmonisation des règles. L’épargne salariale ne doit pas se substituer au salaire et l’on doit faciliter l’utilisation de cet outil. Le Sénat vient de voter mardi 12 mai le texte de loi qui valide bien tous les changements que nous venons d’indiquer. Reste une dernière étape à franchir pour clore son parcours, le passage en commission parlementaire mixte le 3 juin.
Notes:
[1]Le coût total de la baisse du forfait social est estimé de 60 à 80 millions d’euros pour l’Etat.