L’OPEP limite sa production de pétrole
Accord « historique » ou simplement un énième effet signal ?
Actualité : Mercredi 30 novembre à Vienne, les États membres de l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP) sont parvenus à un accord pour réduire sa production de pétrole de près d’1,2 million de barils par jour portant ainsi son plafond de production autour de 32,5 millions de barils par jour. Si cet accord a été qualifié d’historique par les marchés financiers, il n’en demeure pas moins que le soufflé pourrait retomber aussi vite qu’il n’est monté.
Cet accord intervient après des mois de dissensions au sein du cartel. De plus, cette limitation de production est la première en 8 ans (depuis la crise financière de 2008). Dans le sillage de cet accord, les prix du pétrole ont bondi d’environ 8 % à la fois pour le Brent et le WTI. Le prix du Brent a de nouveau dépassé les 50 USD alors qu’il était ancré en-dessous de ce seuil psychologique depuis le 28 octobre dernier. Il s’agit de la plus forte hausse depuis février dernier. Depuis, les deux grandes banques d’investissement newyorkaises que sont Goldman Sachs et Morgan Stanley ont déclaré que le prix du Brent pourrait rapidement remonter vers les 60 USD.
L’accord de Vienne est en réalité le second volet du précédent accord « cadre » d’Alger qui avait été conclu lors de la réunion de l’OPEP du 28 septembre dernier. En effet, l’accord d’Alger prévoyait déjà une limitation de la production de pétrole pour parvenir à une production journalière entre 32,5 et 33 millions de barils par jour. Cependant, la répartition de cette limitation de la production n’avait pas été abordée et c’est cette répartition que l’accord de Vienne vient éclaircir. Voici en détail comment les membres de l’OPEP vont se répartir la limitation de la production de pétrole :
Arabie Saoudite : -486 000 barils par jour ;
Irak : -210 000 barils par jour ;
Emirats Arabes Unis : -139 000 barils par jour ;
Koweït : -131 000 barils par jour.
Dans le même temps, l’Iran, qui, depuis son retour sur la scène internationale après la levée des sanctions à son égard le 16 janvier dernier, a obtenu gain de cause et a été autorisé à augmenter sa production de pétrole de 90 000 barils par jour portant ainsi sa capacité totale de production à 3,8 millions de barils par jour.
Si l’on additionne tous ces efforts, la réduction atteint 876 000 barils par jour, il reste donc un effort marginal de limitation de la production de 324 000 barils par jour. Si la répartition de ces 324 000 barils par jour n’a pas été directement abordée dans l’accord de Vienne. Cet effort marginal devrait être porté par les autres membres de l’OPEP hormis la Libye et le Nigéria qui ont été exemptés de l’effort commun du cartel en raison des conflits auxquels ils font face et de leur impact sur leurs finances publiques et privées. L’Indonésie, quant à elle, a vu son adhésion à l’OPEP gelée car le pays a refusé de souscrire à l’accord de Vienne.
Hors de l’OPEP, un effort de réduction de production de 600 000 barils a été évoqué dont la moitié de cet effort devrait être portée par la Russie. Les 300 000 barils par jours résiduels devraient se répartir entre les autres producteurs de pétrole qui ne font pas partie du cartel, comme l’Azerbaïdjan, le Brésil, le Kazakhstan ou encore le Mexique.
In fine, l’accord de Vienne vient porter la limitation de la production de pétrole à 1,8 millions de barils par jour, avec un effort conséquent de la part de l’OPEP mais aussi de grands pays producteurs de pétrole hors OPEP.
Prix du Brent en USD : mise en lumière de l’effet signal
Source : BSI Economics
Même si l’accord de Vienne se veut historique, il n’en demeure pas moins qu’aucune sanction n’est prévue à l’égard des potentiels contrevenants au sein de l’OPEP et nous pouvons imaginer la difficulté avec laquelle les grands pays producteurs de pétrole hors OPEP pourraient être sanctionnés en cas de non-respect des engagements encore flous définis par cet accord.
L’effet signal devrait être important et le prix du Brent pourrait rebondir au-delà de 53,4 USD atteint à la suite de l’accord d’Alger le 28 septembre dernier. Les 60 USD sont donc atteignables mais il ne fait aucun doute que l’application des limitations devra être scrutée de près.
Enfin, sur le plan macroéconomique, la hausse des prix du pétrole devrait soulager les finances publiques des grands pays exportateurs de pétrole. De plus, les anticipations d’inflation au niveau mondial devraient, pour leur part, remonter vers des niveaux plus soutenables à long terme, poussant potentiellement les politiques monétaires des pays développés vers moins d’assouplissement.