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Colloque Coface Risque Pays 2016

 

 

Colloque Coface Risque Pays 2016

 

Cette année, à l’occasion du 20ième colloque risque pays Coface ayant eu lieu le 26 janvier 2016, . J. M. Pillu, l’ex Directeur Général de Coface, a rappelé les similitudes certaines des problématiques économico-politiques actuelles avec celles de la première édition du colloque. En 1997, les sujets abordés étaient les suivants. Quel chemin emprunte la Russie pour s’en sortir ? Est-ce que le baril de pétrole a trouvé son prix d’équilibre ? Toujours des incertitudes sur le processus de paix au Moyen-Orient ? Que manque-t-il en Amérique latine ? Comment la croissance asiatique pourrait s’essouffler ? Finalement, 20 ans après, ces problématiques persistent. Aujourd’hui, l’économie mondiale fait face à des crises multiples (économique, politique, sociale) et ce avec une visibilité réduite tant les cycles économiques semblent disparaître.

 

Quel avenir pour la construction européenne ?

L’Europe illustre parfaitement ce phénomène de crise multiples : la crise des réfugiés, la Grèce, l’annonce d’un référendum quant au maintien du Royaume-Uni dans l’Union Européenne (UE), etc. Ces événements ont assombri l’avenir de la construction européenne. Toutefois, la nécessité des pays européen à se rassembler est essentielle, selon Jacques de Larosière, ancien gouverneur du FMI. Autrement, les pays, pris à un niveau individuel, ne seront plus présents dans le G7 d’ici 2050 et ne pourront donc plus peser sur la scène internationale. D’autant que le vieux continent est déjà le maillon faible de la croissance mondiale depuis 2009 et une Europe à deux vitesses semble avoir émergé, sans parler de la montée du nationalisme et le manque de moyen, qui est un frein au projet européen. Dans ce contexte de crise multiples et de défiance croissante envers l’Europe, des avancées ont toutefois été réalisées pour renforcer l’Union, comme l’Union bancaire[1] récemment. L’économiste français Daniel Cohen estime cependant que la mauvaise conception initiale de l’UE est illustrée, entre autre par l’Union bancaire, qui aurait dû être créée en même temps que l’Union monétaire.

De même, la remise en question de l’espace Schengen existe du fait de la non-existence d’une politique des frontières communes. La crise des réfugiés sera l’un des principaux points d’achoppement lors des négociations entre le Royaume-Uni et l’UE sur la question du Brexit. Michala Marcussen, économiste en chef de Société Générale CIB, estime que le coût d’une sortie du Royaume-Uni de l’Union serait de 0,5 à 1 point de PIB sur dix ans pour le UK, contre 0,25 point de PIB pour l’UE. Dès lors, le Brexit pourrait être une opportunité compte tenu du coût économique qu’il engendrerait dans un contexte de croissance potentielle modérée. Une opportunité de réformer et de redonner une impulsion au débat européen en changeant de prisme sur la question du Brexit. Ce débat permettrait de s’interroger sur le corpus législatif et réglementaire européen afin de le simplifier, selon J. de Larosière.

Le morcellement des scènes politiques et la montée des partis nationalistes en Europe pourrait peser sur la confiance des investisseurs à court terme, affectant la croissance de l’UE. Outre le risque politique (qui s’est nettement accru dans le monde), deux autres éléments constituent les principales raisons pour lesquelles la croissance de l’économie mondiale ne repartira pas en 2016, selon Julien Marcilly, chef économiste de Coface. D’une part, le ralentissement économique de la Chine pèse à travers plusieurs canaux sur l’économie mondiale : le prix des matières premières, la production industrielle, etc. D’autre part, la faiblesse des prix du pétrole déstabilise les pays émergents et augmente la volatilité sur les marchés financiers.

 

Quel impact du ralentissement économique chinois dans la région ?

La croissance du PIB chinois a atteint de 6,9 % en moyenne annuelle en 2015, contre 9,5 % en 2011. Certains économistes estiment que le ralentissement serait plus prononcé (hard landing), avec une croissance du PIB comprise entre 2 % et 4 %. Ces estimations se font à l’aide d’indicateurs avancés tels les consommation d’électricité, de ciment et du fret de marchandise. Dans la mesure où le secteur des services représente désormais plus de 50 % du PIB (consommation de service d’éducation, de santé et de loisirs en forte hausse au cours des dernières années), ces indicateurs avancés semblent obsolètes pour mesurer l’activité économique, selon Bei XU, stratégiste global chez Exane.

Bien que très concentrée (secteur public bancaire et de la construction), l’augmentation de l’endettement des entreprises chinoises n’en constitue pas moins un des principaux risques pour les autorités. Un cycle de désendettement (qui pourrait se traduire par un ralentissement accru de l’activité) associé à une remontée plus rapide qu’anticipée des taux de la Fed (non anticipée) pourraient peser sur la croissance des pays d’Asie du sud-est, mais de manière inégale. La Malaisie, Hong-Kong et Taïwan devraient être les pays les plus affectés. A l’inverse, les Philippines, le Vietnam, l’Indonésie ou encore l’Inde devraient maintenir un rythme de croissance similaire à 2015.

Par ailleurs, le ralentissement économique de la Chine pourrait être compensé par des projets d’infrastructure, notamment les initiatives binationales d’envergure. La « One Road, One Belt » menée par la Chine devrait ainsi être un nouveau relais de croissance à moyen terme pour les pays d’Asie du sud-est. Ce projet permettra également à la Chine d’implanter localement ses entreprises en y développant son influence, tout en exportant ses surcapacités de stocks à court terme. L’impact du ralentissement chinois est donc pour le moment peu visible sur les économies d’Asie du sud-est.

 

Quelles perspectives d’évolution des prix du pétrole ?

La faiblesse des prix du pétrole affecte lourdement les pays producteurs. A court terme, la faiblesse des prix du pétrole devrait forcer les pays producteurs à réajuster leur budget afin d’éviter une envolée de l’endettement (le déficit public de l’Arabie Saoudite devrait s’élever à 20 % du PIB en 2016). D’autant que de nombreux pays producteurs ont surévalué le prix du baril, sur lequel se base leur budget. Certains Etats pourraient alors être contraints d’arrêter de subventionner publiquement certains biens, ce qui pourrait par ailleurs générer des tensions sociales. Les prix élevés du baril (au milieu des années 2000) aurait dû inciter les pays producteurs à diversifier leurs économies. Néanmoins, la faiblesse actuelle des cours pourrait forcer ces pays à réorienter une partie de leurs investissements dans le secteur non-pétrolier, ce qui serait bénéfique à moyen terme. A cet horizon, plusieurs facteurs devraient influencer le prix du pétrole : (i) l’ampleur du freinage de la production du schiste américain, (ii) la réaction de l’OPEP face au cours du pétrole, (iii) le dynamisme de la demande (qui a d’ailleurs doublé en 2015, comparé à 2014), et bien entendu (iv) l’Iran. La levée des sanctions sur l’Iran aura un impact considérable sur la production de pétrole. L’excès d’offre devrait alors s’accroître à court terme, mais les pressions baissières sur le prix du baril devraient néanmoins être faibles dans la mesure où le marché a déjà pricé  ce retour.

 

Où en est l’Amérique Latine?

L’Amérique latine pourrait être affectée par les trois principaux risques évoqués plus haut. Premièrement, la fin du boom des matières premières a fortement dégradé les termes de l’échange de la région, qui sont très corrélés avec la croissance économique. En 2015, l’Amérique latine dans son ensemble était en récession. Peut-on parler de nouvelle décennie perdue pour l’Amérique latine ? Il existe une forte disparité entre les pays de la zone. Le Pérou et la Colombie ont par exemple affiché de bon chiffre de croissance du PIB (2,8 % chacun). Un accord de paix entre le gouvernement colombien et les FARC pourrait en plus accroître le PIB du pays de 1 %. Le Chili a également une économie saine, même si elle est peu diversifiée. A l’inverse, l’Equateur est rentré en récession, subissant le double effet de l’appréciation du dollar (économie dollarisée) et de la faiblesse des prix du pétrole. L’Argentine devrait être affectée par la levée du contrôle de capitaux par le nouveau président Macri à court terme, mais enregistrer une croissance plus robuste à moyen terme. La récession en Amérique latine tient donc compte du poids dominant du Brésil dans la zone et de la chute du PIB au Venezuela. Dans ces deux pays, la situation est très préoccupante : au Brésil la récession devrait perdurer en 2016 (-3 % prévu en 2016) et un processus d’impeachment envers la Présidente Rousseff est en cours ; le Venezuela (-10 % prévu en 2016) est le pays qui a le plus de chance de faire défaut cette année.

 

Conclusion

Les risques continueront donc de peser en 2016. La croissance économique mondiale en 2016 devrait donc être contrainte par le ralentissement chinois, la faiblesse des prix du pétrole et la montée des tensions politiques. La croissance des pays avancés devrait se stabiliser en 2016 compte tenu du léger ralentissement prévu aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, contrebalancé par l’accélération en zone euro. Les pays en développement devraient toutefois croître à un rythme légèrement supérieur.

                                                                                                                                                                                                                                                                                E.D



[1] Sur le sujet de l’Union Bancaire, voir sur BSI Economics 2 articles récapitulatifs sur le sujet : 1 & 2.

 


 

 

 

 

 


 

 

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