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« Des fonds contracycliques pour prévenir les prochaines crises » (Interview)

 

1. Les plans de relance ont été inédits, particulièrement en France. Ce soutien inconditionnel de l’État semble sans limite pour soutenir l’économie. Quels secteurs sont les plus concernés et ses interventions sont-elles soutenables ?
Beaucoup de secteurs sont concernés par les plans de relance annoncés cette année, étant donné la transversalité de la crise. Si cette dernière semble exceptionnelle, l’histoire montre que certains secteurs bénéficient de manière fréquente de ce soutien financier comme par exemple le BTP ou l’automobile. Les plans se veulent toujours « uniques » mais force est de constater qu’ils deviennent au fil des décennies « structurellement périodiques » ! Par exemple, les « primes à la casse » sont devenues la norme à chaque décennie en étant déployées en 1993, 2009 et 2020.
Ainsi, il apparaît judicieux de demander aux acteurs eux-mêmes de se prendre en main afin d’autofinancer les futurs plans de relance « structurellement périodiques » afférant à leur secteur d’activité. D’où la création de fonds professionnels contracycliques de stabilité sectorielle.

2. Comment mettre en place ces fonds et avec quels acteurs ?
Chaque fonds professionnel serait géré par une association indépendante dirigée intégralement par les professionnels du secteur d’activité concerné sous contrôle des engagements par l’État. La puissance publique devrait veiller en particulier à la dotation du fonds en présence d’activité économique forte et à l’utilisation des réserves uniquement en période de crise. Les fédérations professionnelles de chaque secteur d’activité seraient évidemment pleinement parties-prenantes dans la mise en place de ces initiatives.
Chaque fonds collecterait les contributions de l’ensemble des entreprises (françaises ou étrangères, sous-traitants ou entrepreneur principal) de son secteur d’activité au plus haut du cycle économique. En cas de crise, les réserves accumulées du fonds, propriété de la filière, seraient libérées afin de relancer massivement l’activité.

3. Quelles seraient le montant de ces contributions et comment les définir ?
Les périodes de contribution à chaque fonds seraient déterminées suivant des dépassements de seuils d’activité, définis à leur mise en place et suivis par une institution indépendante et objective – l’INSEE par exemple. Plus concrètement, en période de haut de cycle, les professionnels de la filière pourraient mobiliser une partie du surplus de valeur ajoutée pour alimenter ces fonds.
À titre d’illustration, le secteur automobile pourrait contribuer lorsque les ventes annuelles excèderaient la moyenne des ventes observées sur les 5 dernières années. La contribution serait par exemple fixée à 1500 euros par véhicule dépassant cette moyenne. Une telle collecte aurait représenté sur la période 2016-2019 une contribution moyenne de 140 € par véhicule vendu soit 0,5% du chiffre d’affaires réalisé. À fin 2019, le fonds professionnel de l’automobile aurait ainsi été en capacité de financer près de 400 000 « primes à la casse ». C’est deux fois plus que ce qui a été débloqué par le gouvernement et financé par le contribuable.
 
4. Ces fonds professionnels pourraient-ils rapidement être mis en place ?

Étant actuellement en période de crise, les prochains appels à contribution ne devraient pas intervenir d’ici plusieurs années. Ainsi, afin que la structuration de ces fonds soit la plus pertinente possible, leurs modalités de mise en place au niveau de chaque secteur d’activité pourraient faire l’objet de discussions approfondies avec les professionnels concernés sans pour autant transiger sur les grands principes présentés précédemment. La mise en place opérationnelle de ces fonds devrait donc intervenir au plus tard début 2022, et nous aider à préparer au mieux les crises de demain.

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