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Inflation : transitoire, temporaire ou durable ? (BSI Call)

Le mardi 23 novembre 2021, BSI Economics a organisé un temps d’échange sur la thématique de l’inflation. Ce phénomène est-il transitoire, temporaire ou au contraire peut-il s’inscrire dans la durée, pour quelles raisons, quels seraient les enjeux en termes de politiques économiques ?

Pour répondre à ces questionnements, le panel réunissait un chef économiste d’une banque privée, un économiste en Banque centrale, un stratégiste dans un organisme d’émissions de dette et un docteur universitaire spécialisé en politique monétaire.

Il y a plusieurs raisons de penser que l’inflation serait transitoire :

  • D’un point de vue historique : la situation de nos jours est plus similaire à celle de 1947, où la hausse des prix résultait dans un premier temps d’une demande de consommation qui dépassait la disponibilité de l’offre.
  • D’un point de vue statistique : l’inflation est tirée à la hausse par des effets de base (baisse de la TVA en 2020 en Allemagne) mais également par l’évolution des pondérations des paniers de biens dans le calcul de l’indice des prix à la consommation.
  • D’un point de vue conjoncturel : la hausse de prix de l’énergie et des matières premières intervient dans une phase de fort rebond de l’activité et de tensions sur les chaînes d’approvisionnement et se répercutent sur les prix de production de biens et services et in fine sur les prix de ventes.

Toutefois, plusieurs éléments laissent à penser qu’elle serait durable :

  • L’inflation ne porte plus seulement sur les biens énergétiques comme le pétrole ou seulement sur une poignée de biens… mais sur une part croissante de biens.
  • La forte montée des loyers aux États-Unis, qui représentent presque 1/3 de l’indice d’inflation américain : une forte demande sévit sur le marché locatif en dépit d’une offre insuffisante, ce qui provoque donc une hausse des loyers qui engendrera mécaniquement davantage d’inflation.

Quoi qu’il en soit, il est important de dissocier la situation aux États-Unis de celle observée en Europe :

  • Aux États-Unis, le plan de relance a été quasiment deux fois plus important qu’en Europe (respectivement 1 900 Mds USD contre 750 Mds USD en Europe, soit 9 % du PIB américain contre 5 % du PIB Européen). Cette différence est d’autant plus importante que le plan de relance européen est composé à moitié de prêts, ce qui n’est pas vraiment le cas aux États-Unis (levées obligataires). Les tensions inflationnistes y sont donc plus élevées, d’autant plus qu’elles l’étaient déjà avant la crise.
  • Aussi, ces tensions inflationnistes seraient alimentées par une sortie plus forte du marché de travail de certains travailleurs, qui vivent encore de leur épargne dans l’attente d’un emploi avec de meilleures conditions salariales et de travail. Sous le poids d’une forte demande, les entreprises qui ont besoin de recruter pourraient proposer un plus haut salaire, donc une hausse des prix à marge inchangée. 
  • Enfin, le changement d’orientation de la consommation des biens a été très marqué aux États-Unis, où les ménages substituent leur consommation de certains services par davantage de biens, ce qui fait signifie une demande accrue à un moment où la production fait face à des problèmes d’approvisionnement.

A cela s’ajoute beaucoup d’autres interrogations

  • D’un côté, les banques centrales ont intérêt de maintenir un certain niveau d’inflation pour abaisser plus rapidement le poids de la dette de l’Etat comme des entreprises. D’un autre côté, elles doivent éviter de perdre le contrôle de l’inflation pour éviter que cela n’érode le pouvoir d’achat des ménages. La Federal Reserve (FED) s’est lancée dans une politique de tapering.
  • La crédibilité des banques centrales seront scrutées de près. Plusieurs d’entre elles, comme la FED, ont choisi de resserrer leur politique monétaire après des mois d’over shooting. En Europe, « l’erreur » sous le mandat de J.C. Trichet à la tête de la Banque centrale Européenne (BCE) hante encore les esprits. Une attention particulière devra être portée à l’Allemagne, où les salaires ont augmenté par une hausse du SMIC, ce qui peut se répercuter à la hausse et de manière durable sur le prix des biens dans toute l’Europe via l’inflation importée.

 

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