Le prix Nobel 2018 d’économie, plus précisément « le prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel » a été remis aujourd’hui à deux économistes américains : Paul Romer et William Nordhaus.
Paul Romer enseigne actuellement à l’école de commerce Stern à New York. Il a démontré l’importance de la connaissance et de la circulation des idées sur la croissance de long-terme. Alors que ses contemporains se focalisaient seulement sur l’importance directe des innovations technologiques, il a montré la nécessité de prendre également en compte l’environnement de marché et les décisions des agents économiques dans ce processus. Il a ainsi contribué à introduire la notion fondamentale de « croissance endogène ».
Paul Romer a souhaité mettre en pratique ses modèles à travers la création de « villes à chartre » dans des pays en développement, mais son projet fut contesté et il s’est heurté à des difficultés politiques et institutionnelles. Il critiqua également le caractère irréaliste des modèles mathématiques dans le champ de la macroéconomie, dans un article paru en 2016 : The trouble with macroeconomics. Nommé chef économiste de la Banque Mondiale en 2016, il dû démissionner en 2018 du fait de désaccords avec l’institution.
William Nordhaus est le premier économiste à analyser dès les années 70 le lien entre le climat et l’économie. A travers son modèle DICE (Dynamics Integrated Climate Economy Model, en 1992), il cherche à parvenir à un calcul « d’actualisation » des coûts prévisionnels des émissions de gaz à effet de serre. Cette mesure permet ainsi d’aboutir à un « prix du carbone », qui sert de base à la mise en place de mécanismes incitatifs de marché visant à réduire les émissions.
S’il n’est pas à l’origine favorable à des mesures politiques fortes et fut critique du rapport Stern quant à son calcul d’actualisation, il devient ensuite partisan de la mise en place d’une taxation mondiale de carbone, après la publication de nombreuses recherches sur le changement climatique.
Ainsi, l’Académie royale des Sciences a souhaité récompenser ces deux économistes qui « ont mis au point des méthodes qui répondent à des défis parmi les plus fondamentaux et pressants de notre temps : conjuguer croissance durable à long terme de l’économie mondiale et bien-être de la planète ». L’Académie ajoute que « Les lauréats de cette année n’apportent pas de réponses définitives, mais grâce à leurs découvertes, nous sommes près de savoir comment nous pouvons avoir une croissance économique mondiale prolongée et soutenable« .
Ce prix est annoncé le même jour de la publication d’un rapport du GIEC appelant à des transformations « sans précédent » pour limiter le réchauffement climatique.
Sources : Le Monde, Challenge, Press Release of the Nobel Prize